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Lisa Argelliès, son terrible combat face à l’anorexie, « le suicide lent ».


Une terrible descente aux enfers, un main tendue à La Réunion et une équipe médicale qui lui a sauvé la vie. Avec beaucoup de courage, la jeune femme de 28 ans témoigne et raconte son combat face à cette maladie qui a commencé de façon insidieuse « je n’ai rien vu venir ou presque ». Aujourd’hui, elle va mieux même si elle sait que le combat n’est pas encore gagné face à ce qu’elle nomme «le suicide lent».


Par Chloé Grondin - Publié le Lundi 14 Janvier 2019 à 18:11

Tout a commencé pour elle à la rentrée scolaire 2016, à l’école privée d’esthétique de Strasbourg. Elle a alors 26 ans et est en train de réaliser l’un de ses plus grands rêves de petite fille en se formant au métier d’esthéticienne. Auparavant, la jeune femme qui a la fibre artistique a fait une école de photographie à Bruxelles, mais aussi une formation par correspondance dans la protection de la nature et des saisons dans la restauration. Tout un parcours qui plus tard lui sera bien utile dans son processus de guérison.

« La maladie a commencé sournoisement en différentes étapes »
Lisa raconte, décrit sa vie d’alors et cette chape de plomb qui soudain lui est tombée dessus : « Je vivais depuis quelques mois dans un appartement avec un nouveau chéri, j’avais tout pour être heureuse mais un mal être depuis l’enfance a fait irruption sous une forme particulière. Mon année d’apprentissage était intense, je m’investissais beaucoup. La maladie a commencé sournoisement en différentes étapes: suppression d’aliments, de repas, diminution des quantités, calcul des calories, aliments pesés… Tout était contrôlé ».


37 kgs pour 1m76.
Lisa poursuit son récit, évoquant la maladie qui va menacer sa vie.
« En un an la descente aux enfers est plus rapide que prévue et je n’ai rien vu venir ou presque. De 57/58 kgs à la rentrée, je pèse en juillet 37 kgs pour 1m76 ».

« Je perds ma personnalité autant physiquement que psychologiquement »
Elle va valider son année en juin 2017 mais ses relations sociales et affectives vont se dégrader. Lucide, elle dit les ravages que la maladie fait également sur son cercle proche : «  je m’éloigne de mes proches, je perds mon copain, mon appartement et surtout ma personnalité, autant physiquement que psychologiquement. Tout mon être me fait souffrir, plus aucune activité physique n’est possible. Je suis isolée dans une bulle négative. Je ne suis plus que l’ombre de moi même ».


La main tendue va venir de sa sœur qui habite à La Réunion. Voyant la grande détresse de Lisa , elle va lui proposer de venir se faire aider dans notre île.  « En septembre, ma soeur qui vit à la Réunion vient en vacances en Alsace et me propose de repartir avec elle sur l’île un temps pensant pouvoir m’aider. Hors, cette pathologie nécessite des soins professionnels poussés et adaptés. N’ayant aucune attache en Alsace, à part mes amis et ma famille, je la suis.
Après les urgences psychiatriques de l’hôpital de Saint-Paul pendant 3 jours, j’arrive à la clinique des Flamboyants au Port. Je signe un contrat thérapeutique: pas de visite, de sorties, de contacts réels ou virtuels, de téléphone, de TV, des repas thérapeutiques et je serai accompagnée par un infirmier 3 fois/jour. L’objectif affiché est que je pèse 50 kgs
 ».

Sondée par voie nasale, ses organes vitaux sont touchés
La jeune femme est alors au plus mal. Elle va être sondée par voie nasale dès son arrivée car est proche de la mort. Ses organes vitaux sont touchés. « Cette hospitalisation durant un an a été une expérience très difficile, loin de tous les gens que j’aime et à l’autre bout du monde, envahie par cette maladie, ce suicide lent. ».

Peu à peu ce qu’elle nomme «  des pulsions de vie » vont jaillir. Elle témoigne : « Au fur et à mesure  je reprends des forces et de l’espoir, les palliés sont franchis mais c’est long et laborieux. J’ai des pulsions de vie parfois, cependant la maladie me freine d’un coup dans d’autres moments.
Grâce à l’aide des soignants et de ma famille, je sors de la clinique avec de nouvelles connaissances sur ma personnalité, des passions insoupçonnées comme l’écriture, amenant à la publication de mon premier ouvrage “L’envol” en octobre 2018. 
».

La spirale dans laquelle elle se trouve est enfin positive. Lisa trouve un nouvel emploi dans un institut de beauté, son premier dans sa nouvelle profession. Il s’agit d’un véritable soutien pour elle : « l’équipe, le lieu et les clients m’aident inconsciemment ou non à remettre un pied dans la “vie réelle” et à faire un long travail sur la confiance et l’estime de soi et les rapports avec les autres. Je donne le meilleur de moi-même et j’évolue dans mon métier ».
En Novembre, Lisa a emménagé seule dans un petit appartement avec vue sur l’océan. Une bulle d’oxygène encore pour elle : «  De l’enfermement entre les murs de la clinique avec les autres patients , à la vie d’une jeune femme indépendante... Personne ne peut imaginer les épreuves que j’ai pu traverser, j’ai beaucoup de mal à l’heure actuelle à le faire également. Toutes ces pensées et ces réflexions sur mon passé et ce présent hostile dans la maladie qui m’envahissaient. 
Jamais je n’aurais pu m’en sortir seule et je ne remercierai jamais assez toutes les personnes qui m’ont entourée et qui sont toujours là pour certaines
 ». Lisa sait qu’elle doit également beaucoup à des lectures qui ont été une véritable béquille pour elle.
Très lucide, elle confie : «  Je suis consciente que le chemin vers la guérison totale peut être long. Il est plus facile de chuter que de se relever mais je reste confiante, guidée par mes rêves, mes projets et les beautés de ce monde ». 

Lisa en a des projets, elle a repris son appareil photo, sillonne notre île et savoure ces beautés et a d’ailleurs très envie de nous faire partager  ses découvertes.