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[Témoignage] Harcelée au bureau, un cauchemar qui a duré deux ans


[Témoignage] Alors que l’affaire Harvey Weinstein n’en finit pas de rebondir chaque jour avec son lot de révélations glauques, les langues se délient aussi à La Réunion. Témoignage d’une femme que nous appellerons Sophie, qui a tenu à parler elle aussi…


Par 7magazine - Publié le Mardi 7 Novembre 2017 à 16:00

[Témoignage] Harcelée au bureau, un cauchemar qui a duré deux ans

Loin d’Hollywood, son témoignage est celui d’une femme qui comme tant d’autres a connu l’humiliation et la honte du harcèlement sexuel sur son lieu de travail. Les faits se sont déroulés à La Réunion il n’y a pas si longtemps. Sophie est une très jolie métisse créole, la trentaine qui s'est livrée d'une traite, avec courage…

Elle raconte simplement l’enchainement de son cauchemar qui l’a menée à une grave dépression. « C’était il y a quatre ans. Je venais de divorcer et devais gérer seule mes enfants de 6 et 8 ans… Leur père ne me versait quasiment rien. Pas évident pour moi de joindre les deux bouts en fin de mois. Par le biais d’une amie j’ai entendu parler d’un poste d’assistante de direction beaucoup mieux payé que ce que j’avais. Une entreprise connue de tous ici… Mon entretien d’embauche s’est très bien passé, celui qui allait devenir la plus ignoble des personnes m’a tout de suite mise à l’aise. Il était très sympa, compréhensif par rapport aux enfants et à mes demandes spécifiques d’horaires. J’étais ravie en sortant ! Le job me plaisait vraiment et je travaillais beaucoup. Des histoires couraient entre collègues sur le patron mais je n’écoutais pas les racontars, il était bienveillant et m’avais donné un job dont j’avais tant besoin.

Au bout de deux mois j’étais en totale confiance et c’est là que les choses ont commencé. Je restais toujours au bureau à l’heure du déjeuner pour sortir plus tôt pour pouvoir aller chercher les enfants à la sortie de l’école. La première fois il est rentré dans mon bureau, je déjeunais devant mon ordinateur et il m’a demandé si je n’avais pas une autre faim ? Sur le moment j’ai pensé que c’était moi qui comprenais mal mais il a eu un geste en touchant son pantalon qui n’était pas équivoque. J’ai eu peur tout simplement nous étions seuls dans les locaux. 
Dès le lendemain même approche mais là il m’a touchée et a essayé de m’embrasser. J’ai hurlé et lui ai dit d’arrêter. Il était comme fou et m’a insultée. Il me disait que j’étais nulle et que si il m’avait embauché c’est juste pour me b…
J’étais tétanisée et paniquée à la fois. J’avais besoin de ce travail pour les enfants, pour mon loyer. A qui en parler ? Aussi énorme que cela puisse paraître j’avais honte. Je me sentais salie. 
Ensuite je ne saurais expliquer ce qui s’est passé dans ma tête. Je l’ai laissée me toucher, dans ma tête je fermais tout. C’était horrible. Cela a duré deux ans. J’étais devenue un objet, incapable de réagir, de porter plainte. Il me disait que j’aimais cela. C’était horrible… Je n’en ai parlé à personne. C’était des attouchements dès qu’il le pouvait. C’est paradoxal mais c’est la mort de mon père qui m’a sauvée. Je suis tombée en grave dépression, je savais au fond de moi ce qui n’allait pas. Je ne pouvais retourner travailler. Mon corps ne le supportait plus…
Ma chance a été de rencontrer une femme, mon médecin généraliste et un jour dans son cabinet tout est sorti. J’ai parlé pour la première fois et tellement pleuré. J’ai eu le courage de retourner le voir, de lui dire de faire une rupture immédiate de mon contrat. Il savait que je ne me laisserai plus faire et que sinon je parlerai. Je ne sais si je l’aurais fait?  

Je me reconstruis peu à peu. J’ai retrouvé un autre travail. Je n’en veux qu’à lui. Mes collègues imaginaient-ils mon calvaire ? Je ne porterai pas plainte, je n’ai pas ce courage, pas envie. Tout  ce que je veux dire c’est que la première fois j’aurais dû dire non, fuir. J’aurais dû parler… Ce sont des malades, la seule solution est la fuite et aujourd’hui j’admire vraiment ces femmes qui osent parler et porter plainte. Moi je n'irai pas jusque là mais j'espère qu'il me lira.
 ».